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Bienvenue à la bibliothèque: Obstacles à la prestation de services en français en bibliothèque

By: Katherine van der Linden and Claire Dionne

Cet article est le premier d’une série en trois parties qui examine les défis entourant la prestation de services en français en bibliothèque dans un environnement majoritairement anglophone.


Katherine était ravie de se voir offrir un poste dans une bibliothèque publique bilingue comme premier emploi à temps plein après ses études en bibliothéconomie. Ce serait une occasion d’approfondir ses connaissances de la littérature et de la culture francophones, et d’utiliser le français au quotidien. En même temps, elle prévoyait une courbe d’apprentissage importante dans l’utilisation de la langue dans le contexte d’une bibliothèque: jusqu’à présent, elle n’avait pas souvent utilisé le français à l’extérieur des salles de classe ou des voyages.

Elle avait raison pour les deux points; c’était une merveilleuse occasion d’apprentissage et de développement personnel que de travailler avec des collègues francophones. Mais elle ne s’attendait pas à l’ampleur des défis qui lui étaient réservés pour devenir aisée en français en bibliothèque.

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Trois facettes de son emploi lui ont causé des ennuis particuliers:

D’abord, le vocabulaire des bibliothèques n’était pas facile à assimiler. Le jargon professionnel d’un domaine spécifique comme la bibliothéconomie est rarement compris dans les dictionnaires (ex: booktalk, display, readalike, shelf talker). Pour compliquer les choses davantage, ses collègues francophones utilisaient régulièrement des traductions différentes pour les termes anglophones (ex: place a hold : demander/réserver un article, faire/soumettre une demande, faire venir un article d’une autre succursale).  Parfois, ils n’employaient même pas de traduction et utilisaient le terme en anglais (il faut re-passer le bookdrop parce que le reader n’a pas tout détecté).

Ensuite, lorsqu’elle a commencé à offrir un programme pour les enfants d’âge préscolaire, c’est devenu bien évident que Katherine a appris le français à l’âge adulte.  Les programmes d’alphabétisation des bibliothèques comprennent plusieurs chants et comptines pour les enfants, et on n’apprend pas de tels chants au cours d’un programme d’apprentissage du français au niveau post-secondaire.  Ainsi, Katherine a commencé dans son poste ne connaissant aucun jeu de doigt et seulement deux comptines (Sur le pont d’Avignon et Alouette).  Il existe bien sûr de nombreuses collections de chants et de comptines, tant dans les livres que sur Internet, mais sans la connaissance des mélodies et le contexte culturel de la communauté francophone locale, c’est difficile d’en tirer profit.

Dernièrement, pour offrir des services d’aide aux lecteurs, il faut non seulement une certaine connaissance d’auteurs, de titres, et de séries, mais il faut aussi connaître le vocabulaire pour bien décrire les genres et le style de ces titres.  Katherine n’avait pas d’outils comme NoveList pour l’aider à dénicher puis à recommander des lectures, et elle était plutôt limitée dans sa capacité de décrire ces textes (ex: “This murder mystery is part of the Scottish Noir genre. The novels are gritty, fast-paced, and anchored by a tenacious and driven detective.” devenait “C’est un mystère en Écosse et il y a beaucoup de livres dans la série. C’est très bon. L’inspecteur est intéressant.”).  Il fallait un montant considérable de temps et de recherche pour mettre ensemble des recommandations, tant pour aider un client que pour des listes de lectures ou des étalages. 

N’est-ce pas étourdissant?

A librarian reading to young children

En réponse à ces défis, Katherine a commencé à mettre ensemble une référence personnelle de mots en français utiles.  Alors que cette ressource grandissait pour devenir un lexique personnel considérable, Katherine a vite compris que d’autres pourraient également bénéficier de cette ressource.  Il fallait toutefois qu’un francophone contribue au projet, afin de valider les entrées.  Heureusement, elle avait récemment rencontré une nouvelle collègue qui a le souci du détail et un diplôme en lettres françaises.

Le projet a rapidement capté l’intérêt de Claire, qui éprouvait elle aussi des difficultés à travailler en français, malgré le fait qu’elle soit francophone.  Ayant fait ses études en bibliothéconomie à Dalhousie University, Claire a appris le vocabulaire et les concepts du domaine en anglais. Lorsqu’elle a commencé à offrir des services en français en bibliothèque, elle devait passer un temps considérable à chercher la traduction des mots dans leur contexte spécialisé afin de pouvoir les inclure dans ses affiches, dans ses messages, ou encore, personnellement, dans ses demandes d’emploi.  Parfois, c’était plus facile d’utiliser le terme en anglais (je ferai un nouveau display après mon outreach de ce matin), ou même d’abandonner et de rédiger le courriel en anglais plutôt qu’en français.

En plus des difficultés au niveau du vocabulaire, Claire avait aussi des problèmes semblables à ceux de Katherine dans d’autres aspects de son travail. Sans outils francophones pour l’appuyer, certaines tâches devenaient accablantes.  Quoique son répertoire de comptines était suffisant pour l’heure du conte pour les enfants d’âge préscolaire, elle était surprise de constater le temps considérable que ça lui prenait pour rassembler assez de contenu pour un programme pour bébés.  Les comptines qu’elle connaissait n’étaient pas toutes aptes à chanter avec un public si jeune, et ce n’est pas évident de faire des recherches pour trouver des comptines qui répondent à des besoins particuliers (ex: des chansons pour faire sauter les bébés sur les genoux).

Finalement, quoique Claire a une bonne connaissance d’auteurs et de titres en français, elle a découvert que, lorsqu’il faut se fier uniquement sur ses lectures, ses connaissances, et ses expériences pour offrir des services d’aide aux lecteurs, les recommandations fournies sont plus limités et moins riches que celles qui peuvent être fournies en utilisant un outil comme NoveList.  Claire trouvait que la qualité de son travail en français souffrait car il existe moins de ressources pour l’aider à enrichir son travail, et celles qui existent sont moins connues et plus difficiles à trouver.

Nous avions entrepris d’élaborer un dictionnaire bilingue de termes de bibliothèque, mais nous avons vite compris que les défis dépassent ceux liés au vocabulaire.

Mernu from the Library Lexique website, listeing music, lexicon and bilingual librarian tools

 

Donc, nous avons ajusté notre vision pour développer un site web qui appuie l’offre de programmes d’alphabétisation en français, et qui rassemble des ressources pour faciliter l’utilisation du français dans l’environnement des bibliothèques.  En janvier 2021, nous avons lancé la première version de cette ressource, Library Lexique, au www.library-lexique.ca.

Cet automne et hiver, dans Open Shelf, nous examinerons certains défis entourant la prestation des services bilingues en bibliothèque, que nous avons explorés en développant Library Lexique.

Dans notre prochain article au mois de novembre, nous traiterons le sujet du vocabulaire spécialisé et du processus de création d’un lexique.  Nous partagerons nos expériences et certaines questions auxquelles nous avons fait face dans l’élaboration du lexique.  Nous expliquerons comment nous avons procédé pour choisir les traductions des termes du domaine.

Puis, au mois de janvier, nous examinerons la programmation pour enfants en français.  Nous aborderons des sujets tels que le choix de livres appropriés pour un programme, et les différences rythmiques entre les chansons anglais et français.  Nous offrirons également des conseils pour qu’un animateur anglophone puisse introduire avec confiance du contenu en français dans ses programmes.

Il existe de nombreux obstacles dans la prestation des services en français en bibliothèque, ce qui décourage l’utilisation du français dans le milieu de travail.  Pourtant, c’est une grande richesse pour la bibliothèque de pouvoir offrir ces services.  Nous vous invitons à nous accompagner dans l’exploration de ces défis au cours des prochains mois et à réfléchir à vos expériences personnelles et aux besoins de vos usagers.

De quelles façons votre bibliothèque ou votre milieu de travail offre-t-il des services en français?  Partagez en répondant au sondage dans la barre latérale!


Katherine van der Linden travaille à la Bibliothèque publique d’Ottawa depuis 2014.  Son parcours pour devenir aisée avec la langue française est une expérience enrichissante jusqu’à présent, tant au niveau professionnel que personnel.  En chemin, elle a créé la chaîne YouTube 1,2,3, on chante! pour la BPO, et a fondé Library Lexique en tant que projet personnel.

Claire Dionne oeuvre en gestion de l’information et de documents au sein d’une petite institution du gouvernement fédéral, et travaille depuis plus de 10 ans à la Bibliothèque publique d’Ottawa sur une base occasionnelle.  Diplômée en lettres françaises et une fière franco-ontarienne, fonder Library Lexique lui a permis de mettre à profit son habitude de relever la bonne utilisation de la langue française au quotidien.

Vous pouvez communiquer avec Katherine et Claire au librarylexique@gmail.com.

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